Etude multi-échelle du méthylome spermatique bovin

Une étude multi-échelle du méthylome spermatique bovin met en évidence des éléments conservés entre espèces, mais aussi des particularités du génome bovin.

Alors que la semence de taureaux est un produit largement diffusé sur le marché de l’insémination artificielle, il existe peu de données sur la méthylation de l’ADN dans le spermatozoïde bovin. Le méthylome spermatique est pourtant le fruit d’une reprogrammation épigénétique ayant démarré dès la vie fœtale, et joue un rôle essentiel dans la compaction de la chromatine et la protection du patrimoine génétique paternel.

L’unité BDR  en partenariat avec Allice a mené une étude multi-échelle de la méthylation de l’ADN dans le spermatozoïde bovin comparativement à d’autres types cellulaires et d’autres espèces.  bmcgenomics.biomedcentral.com
Le méthylome du sperme a été comparé avec celui de cellules somatiques adultes (fibroblastes, foie, monocytes) en utilisant deux approches pan-génomiques couvrant des régions différentes du génome : RRBS et MeDIP-chip (immunoprécipitation de l’ADN méthylé et hybridation sur une puce de promoteurs bovins). Deux sets indépendants de séquences différenciellement méthylées dans les spermatozoïdes par rapport aux cellules somatiques ont ainsi pu être identifiés. Dans les deux sets, une grande majorité de ces séquences se trouve hypométhylée dans les spermatozoïdes. Conformément à ce qui est décrit chez d’autres espèces, les séquences spécifiquement hypométhylées dans les spermatozoïdes sont enrichies en gènes de la méiose et de la spermatogenèse, de la machinerie de production des piRNA, ainsi qu’en séquences répétées de type satellite. De manière plus inattendue, la comparaison avec des spermatozoïdes d’autres espèces (béliers, boucs, étalons, verrats, souris mâles et Homme) a montré que la méthylation globale de l’ADN était particulièrement basse dans le spermatozoïde bovin (45.5% contre 57.1% à 76.1% pour les autres espèces), en miroir avec un taux de séquences satellites particulièrement abondant aux sites ciblés par LUMA. La surreprésentation de ces séquences dans le génome bovin, ainsi que leur hypométhylation, pourraient expliquer pourquoi les spermatozoïdes bovins présentent un taux de méthylation global plus bas que les spermatozoïdes d’autres espèces de mammifères.
L’originalité de ce travail  a été d’étendre au génome bovin les connaissances disponibles sur les spermatozoïdes de différentes espèces, et de montrer que les séquences satellites, qui ne sont que partiellement déméthylées au cours de la reprogrammation épigénétique de la lignée germinale mâle chez l’Homme et la souris, présentent un niveau de méthylation très bas dans le spermatozoïde bovin. Ces résultats suggèrent que des mécanismes spécifiques à l’espèce bovine sont à l’œuvre pour la reprogrammation ou le maintien de la méthylation dans la lignée germinale mâle.
Jean-Philippe Perrier, Eli Sellem, Audrey Prézelin, Maxime Gasselin, Luc Jouneau, François Piumi, Hala Al Adhami, Michaël Weber, Sébastien Fritz, Didier Boichard, Chrystelle Le Danvic, Laurent Schibler, Hélène Jammes and Hélène Kiefer. A multi-scale analysis of bull sperm methylome revealed both species peculiarities and conserved tissue-specific features. BMC Genomics 2018, 19(1):404.

Financements :
ANR-13-LAB3-0008-01, Labcom « SeQuaMol » et ANR-11-INBS-0003, « CRB-Anim ».